jeudi 19 novembre 2009

La couleur de l'espoir

C’est un formidable moment pour les amateurs de foot en France. Nul doute que la fête sera belle dans les rues tricolores pour fêter Hugo the boss et sans doute refuser de trop évoquer la main de celui qui ne sera jamais Henry the king. C’est surtout une formidable leçon pour les amateurs de sport dans le monde que de voir les supporteurs irlandais applaudir les deux équipes au coup de sifflet final. Et même s’ils sont bien tristes et dépités, même si le sentiment d’injustice doit les ronger, je ne serais pas surpris d’en voir quelques-uns se mêler à l’après-match pour, malgré tout, dire que c’était un belle rencontre et qu’elle en mérite d’autres. Tant mieux, tant mieux, car quels drames par ailleurs.

Le 17 septembre dernier, Brice Taton, un supporter toulousain de vingt ans était agressé à Belgrade, quelques heures avant le début d’un match de coupe d’Europe, et décédait quelques jours plus tard ; les tribunes espagnoles et italiennes, voire françaises, bruissent de chants racistes et s’ornent de calicots xénophobes ; les soi-disant « classico », tel PSG/OM ou inversement, se « vivent » entourés de barrières et de policiers bientôt plus nombreux que les spectateurs ; les équipes féminines nord-américaines semblent verser dans un concours de catch sur herbe ; on reçoit régulièrement des informations sur un supporter poignardé, quelques autres molestés ou un bus caillassé sous les pyramides… on va de moins en moins au stade de foot avec ses enfants.

Fut un temps l’on pointait régulièrement les exactions des hooligans anglais, hollandais ou allemands avec des dates qui sonnent comme des points d’orgue de leur folie, telle la tragédie du Heysel en 1985, qui aura marqué le monde entier. L’histoire et l’analyse de ces mouvements étaient (et restent) complexes, mêlant politique, organisations mafieuses, intérêts économiques croissants et situations sociales générales en déliquescence. Les états et les polices de chaque pays concerné, les clubs également, ont peu à peu (accepté ?) pris en compte le fait qu’il y avait urgence et que ce n’était plus des phénomènes contrôlables et encore moins acceptables. Identifications, interdictions de stade, collaborations entre les groupes de supporters et les directions de clubs, sanctions lourdes si nécessaire, un arsenal de mesures a été plus ou moins mis en place et effectivement, les choses se sont calmées, même si elles n’ont pas disparu.

La violence dans le sport ne date pas d’aujourd’hui. L'historien romain Tacite signalait déjà qu’on en venait parfois aux mains s’il s’agissait de défendre l’honneur d’une cité dans une compétition, et les sports anglais ont, dès leur création, véhiculé ce genre de comportements. A l’évidence il y a toujours une énergie qui se dégage par essence de la participation à un événement sportif. Oui, le défi de la mesure à l’autre engendre, comme une incidence, de la vexation chez le vaincu et parfois de la gausserie chez le vainqueur. Et ça peut vite faire monter le feu aux joues. Mais tout de même.

Pourquoi en arrive-t-on à ces excès dans le football, qu’on ne voit pas, par exemple, dans le rugby ? Sans doute des raisons historiques et culturelles mais n’y a-t-il pas des causes à trouver ailleurs ? Par exemple, dans la conjonction du volume de sa pratique avec la masse sans cesse croissante des échanges financiers ou encore une utilisation politique des résultats, toutes ces hypertrophies socio-économiques qui ne peuvent qu’engendrer du fanatisme.

Le football est sans doute un reflet de notre société, notamment de sa violence. Il offre toutefois, parfois, de beaux moments d’échanges entre les peuples. Les irlandais ont su le prouver ce soir. Vivement qu’un jour, le vert soit la couleur du ballon rond partout dans le monde.

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