lundi 14 octobre 2013

Rugby Asset

«What a week !» comme dirait ma bretonne préférée. Oui, quelle semaine pour le rugby. L’air de rien la tectonique des plaquages vient en effet de fournir une nouvelle donnée. Ainsi, alors que la H Cup démarrait ce WE pour le XV, Canal + venait d'annoncer qu’elle diffuserait désormais les HSBC Sevens World Series, grands rdv internationaux du rugby à 7. Un petit événement sans doute mais comme le disait Lao Tseu, « un voyage de mille lieues commence toujours par un premier pas ». Car en 2016, le 7 sera olympique. Et la planète rugby risque de changer de visage pour toujours.

La dernière apparition de la balle ovale aux Jeux remonte à 1924. Ils se tenaient à Paris et le rugby n’offrait en fait qu’un mini tournoi entre les Etats-Unis, la Roumanie et la France. What a program ... De plus, la « finale » entre les joueurs de foot américains relookés et les coqs locaux gominés restera dans les annales non par le niveau de jeu mais par la propension des intervenants à s’en mettre plein la ganache, les locaux faisant ici respecter une longue tradition de savoir-vivre et les invités de savoir-faire. Mais les seigneurs des anneaux ne l’entendirent pas de cette oreille et tapèrent sur la table comme si, déjà, il n’y avait pas eu assez de coups de poing. Coubertin jura qu’on ne l’y reprendrait plus et surtout, qu’il ne les reprendrait plus.

Depuis, le déploiement international du XV, malgré la création de la Coupe du monde, n’a toujours pas convaincu les instances olympiques. Et petit à petit l’idée du 7 a fait son nid. Des mêlés et des touches qui n’en sont pas, évitant la plupart des incompréhensions des supporteurs mass-market, du combat au près inexistant, rassurant les mamans sur l’avenir de leur progéniture, et surtout de la vitesse, des contournements, des grandes chevauchées, du jeu de passes en veux-tu en voilà sur des rencontres courtes et remplies d’essais. Sans compter le spectacle traditionnel en tribunes, à l’instar du légendaire Tournoi de Hong Kong où des colonies entières de britanniques viennent chaque année depuis 1976 se déguiser en dindon ou autre Super Mario, l’important étant d’avoir une bière gigantesque à la main et de remporter le concours de costumes débiles ou de tenter un record du monde de chants improbables.

Le XV est une religion et elle a ses adeptes. Anglo-saxons lorsqu’il s’agit de complexifier au maximum les règles pour ramener vers la conduite à droite et le roastbeef bouilli ; latins s’il y a matière à magouiller un peu tout en jurant sur la tête de sa mère que c’est l’autre qui a commencé. Mais elle n’a pas su convaincre au delà de son cercle premier d’apôtres. Ceux-ci resteront fidèles et j’en fais partie, mais force est de reconnaître que son courant, avec le 7, offre d’autres atouts, emportant le grand public et assurant une extension planétaire. Car même si l’Angleterre les néo-zélandais ou les sud-africains font partie des nations majeures des deux pratiques, on retrouve dans l’élite du 7 le Portugal, la Russie ou le Kenya. Et ça change tout, surtout pour ce que peut être le rugby de demain, un fils à JO.

Je me souviens, à la fin des années 80 avec l’UFR STAPS de Nice en compagnie notamment de mon ami Julien Schramm et entraîné par Daniel Herrero, notre équipe avait joué LE tournoi à 7 universitaire de l’époque, celui de l’Ecole Centrale de Paris. Nous étions solides mais plutôt portés sur le combat collectif, les grandes parties de manivelles et les chandelles incendiaires. Des valeurs ancestrales de XV quoi. Or, c’est comme cela que nous jouions aussi à 7 et si le niveau relativement faible des équipes nous avait porté en finale, les spécialistes écossais que nous y rencontrions alors nous avaient donné une leçon et surtout démontré que ce n’était pas le même jeu. Nous leur avions couru après tout le match, nous soulageant d’une sympathique bagarre générale au final pour avoir bonne conscience, mais nous avions perdu quoi qu’il en soit, y compris pour l’obtention du Prix du public. Et je crains, si toutefois il faut le craindre, que ce ne soit le même sort qui attende ce rugby que nous aimons tant aujourd’hui et que nous vénérerons sans doute encore demain. Mais peut-être comme une légende.


1 commentaire:

  1. Bonjour Fred,

    Ca fait plaisir de lire un billet comme ça sur le rugby à 7 !
    Mais c'est surtout le dernier paragraphe qui m'a mit le sourire aux lèvres. En effet le tournoi à Centrale Paris que vous évoquez n'avait duré que 2-3 ans à l'époque. Cependant il a refait surface et fêtera en mai prochain sa 10e édition. Il se nomme désormais le Centrale 7 et a élevé son niveau pour accueillir les meilleurs équipes universitaires mondiales : Oxford, France U, Kenya, Tauranga, Stellenbosch,...

    J'ai été le responsable de la communication de ce tournoi lors de la 9e édition, et à l'approche de l'édition anniversaire nous souhaitions nous retourner sur le passé, et je serais donc bien preneur de votre retour d'expérience sur le tournoi à l'époque, et bien sûr de photo ou de quelconques documents si vous en possédez.

    Merci d'avance,

    Pierre
    pierre.gardeux@student.ecp.fr

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