Alors
qu’en ce week-end du 11 novembre, l’Histoire tricolore se manifestait Porte de
Versailles par le lancement du Salon du Made In France, je me demandais si pour
un rugbyman local cela pouvait constituer un crime de lèse majesté que d’avoir
comme rêve ultime de porter le maillot noir des rois All Blacks.
Samedi
9 novembre 2013, la France défie la Nouvelle Zélande dans sa maison du SDF deux
ans après la finale perdue à Auckland pour le titre de champion du monde. La
Marseillaise chantée à pleins poumons, j’attends de vivre pour la énième fois
le Haka, ce rite local devenu coutume internationale. Depuis 1905, les All
Blacks ont rendu célèbre cette danse-chantée maorie interprétée
traditionnellement à l'occasion de cérémonies, de fêtes de bienvenue, ou avant
de partir au combat.
De
guerre, on en parle beaucoup en cette soirée automnale, puisque l’on commémore
les 18 000 soldats néo-zélandais, tombés sur le sol français durant le conflit
de 14-18, et notamment les 13 membres de l’équipe nationale de l’époque dont le
premier capitaine emblématique, Dave Gallaher. Le trophée qui porte aujourd’hui
son nom et qui récompense le gagnant de chaque rencontre entre les bleus et les
blacks, rappelle que des hommes du bout du monde ont donné leurs vies pour des
hommes du bout de nos rues. Ce soir ce sera donc la version impressionnante du
Haka qui sera livrée, le Kapa o Pango, réservée au choix du capitaine, car le
moment est exceptionnel.
Alors
que les traditionnels abrutis que les portiques de sécurité n’arrivent toujours
pas à filtrer balancent comme des bœufs de leurs places bien planqués leurs
sifflets déplacés, je comprends le choix de McCaw. Pour les néo-zélandais c’est
l’occasion unique de célébrer leurs grands anciens, maoris ou non, tous ceux
qui ont fait la fierté du «pays du long nuage blanc » et démontrer qu’ils sont
une seule et même nation, qu'ils peuvent communier ensemble autour d’une
histoire commune et souffler l’esprit de leurs aïeuls respectifs comme un seul
homme, all blacks. A cet instant, le Salon du Made in France est bien loin de
ces men in black et je défie quiconque est dans le stade, de ne pas rêver de
danser à leurs côtés.
Je me
demande ce que Basile, 4 ans, à côté de moi, saisit de tout cela. C’est son
premier match de rugby et il ne le sait pas encore mais plus tard il comprendra
que ce moment était rare. Pour l’heure, il s’ébahit de la ferveur du «chant des
français » et de la fièvre de la «danse des tout noirs ». Lui, le fan de hand et
de Mikkel Handsen, cherche le «gardien dans les buts » et se demande ce que les
joueurs peuvent bien «manger dans leurs bouches », riant de toutes ses dents de
lait à la beauté d’un plaquage ou d’un ballon volant. Petit à petit, il
s’imprègne du caractère du jeu, il voit les «cabanes » quand on fait tomber la
balle et se demande «pourquoi ils n’envoient pas le ballon devant pour aller
plus vite »; il sent la richesse de ce jeu. J’espère qu’il en ressent aussi, ce
soir, le trésor de l’Histoire qu’il porte, les valeurs qu’il transmet, le
respect d’hommes qui s’affrontent pour se confronter, rendent des comptes pour
se rencontrer et rappellent que le combat, aujourd’hui, n’est plus la guerre
dans nos pays, qu’il ne fait plus pleurer les yeux des enfants et qu’au
contraire, il peut les faire briller, tard dans la nuit, comme ceux de Basile.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire